samedi 1 septembre 2012

Analyse d'ETTY Macaire


Le Jour Où La Vie M’a Fait Pleurer de François D’Assise N’Dah : Un regard étonnant sur la Vie





Sur la première page de couverture, l’image d’un enfant larmoyant. De cette image associée au titre du livre, j’ai tiré ma première hypothèse de lecture : les lamentations d’une conscience blessée. L’émotion n’est elle pas nègre ? Moi, je n’avais pas envie de goûter à ces histoires pathétiques, à ces complaintes stériles, à ces élégies infécondes, à ces jérémiades improductives qui vous brisent le cœur et vous gâchent la journée. J’étais réticent ; mais était là sur mon bureau le livret jaune, qui me regardait, qui m’implorait. Alors, je le lus pour que cesse ce regard accusateur sur ma nuque. D’abord d’un trait. Puis, je repris la lecture. Je consommai le livre. Lentement. A petite dose. Ligne par ligne. Page par page. La digestion, je la voulais lente.


Au terme de ce parcours dans le monde de la pensée, je m’assis pour m’interroger. Mes sentiments : L’étonnement, la surprise. Agréablement. Ecoutons cette voix : « Si votre enfant vous demande aujourd’hui : « dieu existe-t-il » répondez lui oui. Mais s’il vous pose la même question, répondez-lui nom. Et si après demain, il revient à la charge, dites lui que vous n’en savez rien. L’expérience de l’existence ou non de Dieu n’est pas un héritage qu’on lègue : c’est un bien personnel qu’en conquiert à la sueur de son front. » (P 43, 44 »). Dans ce livre grave, à l’accent à la fois douloureux et optimiste, j’entendis une voix, celle d’un penseur. Qui se donne pour tâche/corvée d’interroger la Vie, si fluctuante et si fuyante, pour en extraire la substance qui nourrit l’esprit. Au cœur des textes qui s’égrènent, je me familiarise avec une plume soucieuse de cogiter, de solliciter la raison, de traquer des ombres.  De féconder des interrogations légitimes et surtout nobles. Aucune réponse définitive mais des questionnements.  Elle ne prétend pas donner des réponses mais d’interroger. Mais au bout de chaque interrogation, la pensée se fixe, l’esprit s’illumine. Une quête douloureuse de lumière.  Une invite à la méditation. Un appel à la sagesse, à une nouvelle sagesse. La position du penseur N’Dah est souvent déroutante, iconoclaste.«« Dieu est mon Idéal…Satan, lui, est mon Maître » (p 40) « La Mort n’est pas le contraire de la Vie…Le contraire de la Mort, c’est la Naissance » (P41). L’inquiétude est souvent au rendez-vous.


Le projet philosophique de N’Dah se trouve à l’intersection des saillies de Kalil Gibran et des réflexions de L’ecclésiaste.  L’intertextualité y est forte. Et les influences bien que discrètes, n’échappent pas à l’attention du lecteur avisé.  Le message de N’Dah, on pourrait le dire, est frappé du sceau des grandes vérités révélées par les plus grands maîtres spirituels qui ont marqué le monde : Jésus, Mahomet, Socrate, Bouddha… qui à quelques nuances près prônent les mêmes idées d’amour, de partage, de sagesse. Les pensées les plus originales sont, en vérité et toujours, des pensées déjà pensées. L’ecclésiaste disait à juste titre : « Ce qui a été, c’est ce qui sera, et ce qui s’est fait, c’est ce qui se fera, il n’y a rien de nouveau sous le soleil. S’il est une chose dont on dise : voici ceci, c’est nouveau ! Cette chose existait déjà dans les siècles qui nous ont précédés » (Eccl. chapitre 1 : 9, 10, 11). Le mérite de notre penseur c’est de nous réconcilier avec des vérités enfouies dans les sinuosités d’une existence prise aux pièges du matérialisme aliénant. En termes autres, François D’Assises N’Dah nous exhorte à tirer nos forces de l’esprit qui est reconnu par les plus grands maîtres comme le siège mal connu du bonheur humain.


A quel genre appartient ce  livre ? Poésie, nouvelles, fables… Tout à la fois. Les textes ondoient entre le vers et la prose. Fantaisie, malaise  ou impuissance ? Dans cet écartèlement et cette perplexité, éclatent la complexité et l’énigme de la Vie. En effet, « la vie n’est pas un cours d’eau tranquille sur lequel on navigue à bord d’un bateau de plaisance. C’est  un univers composé certes d’autoroutes éclairées, d’avenues majestueuses, d’échangeurs hallucinants, mais aussi et surtout de voies sans issues, de virages dangereux, de voies à sens unique, de pistes cyclables, de routes à caractère prioritaire, de carrefours sans signalisations, et de tout un réseau complexe de codes qu’il faut apprendre à déchiffrer » (p 47).  Nécessité donc de plusieurs postures, de différentes perspectives et de divers angles. Pour mieux construire le sens et livrer la quintessence de son message.  Cependant, rigoureusement, l’écriture de N’Dah n’est pas soucieuse de formules ornementales. Les poèmes de ce livre bien que « dodus »  du point de vue du sens, choit par leur manque d’audace stylistique. Au niveau structurel, ils sont dépourvus d’élan subversif. Ce manque la rapproche à une simple marche, une prose. Or, la poésie doit être et rester une danse. Ici, il ne s’agit pas de « Dire bien » mais de « Dire juste et fort ». Plus qu’un artiste, nous découvrons un penseur. Et sur ce point le penseur a atteint son but. Les deux dernières sections du livre frappent par leur ton sentencieux et leur profondeur spirituelle. La force de ce livre repose sur les textes en prose qui ont la teneur  et la profondeur des fables et des paraboles dignes des plus grands maîtres de la pensée. La prise de conscience de l’hybridité et/ou la dualité de la vie trouve son écho dans l’avalanche des oxymorons et des antithèses. Les titres des sous-parties (Les complaintes du Prince déchu, De Silence et De Lumière et Une oasis dans le désert) et certaines maximes qui rythment l’œuvre corroborent le dualisme qui soutient le principe créateur. 



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